Le philosophe et le sophiste revendiquent la sagesse (sophia). Ils se ressemblent donc de la même manière - dit Platon - que le chien ressemble au loup. La philosophie n'a rien à gagner avec cette assimilation. Voilà pourquoi, après avoir écrit plusieurs dialogues polémiques à l'égard de la sophistique, Platon décide d'être plus radical : seule une analyse en profondeur de l'être et du non-être permettra de tracer la frontière qui sépare de manière définitive le philosophe, l'homme libre qui évolue dans la lumière de la vérité, du sophiste, le faussaire qui s'enfuit dans l'obscurité du non-être . L'analyse platonicienne aura cependant des conséquences inattendues : l'opposition classique entre l'être et le non-être, systématisée par Parménide, sera réfutée, et le jugement faux trouvera une explication en dehors de l'impossible revendication du non-être. Aristote, fidèle lecteur du Sophiste, trouvera ainsi ouverte la voie qui le conduira vers sa théorie de la prédication multiple de l'être.