Le père de Dagobert s'appelait comme son fils, et tous leurs aïeux avaient porté le même nom.
De père en fils, d'oncle à neveux, les Dagobert étaient forgerons du couvent et se mariaient.
Cela remontait à plusieurs centaines d'années, et les gentilshommes de la province avaient coutume de dire : "Si l'ancienneté de la race fait la noblesse, les Dagobert sont aussi nobles que nous."
Les abbés se succédaient au couvent, les Dagobert se transmettaient d'âge en âge et de génération en génération leur marteau de forgeron en guise de sceptre.
C'était une royauté héréditaire en présence d'une monarchie effective.
Or, à l'époque où commence notre histoire, le dernier des Dagobert, qui se nommait Jean, n'avait plus ni père, ni mère, ni frère, et il était célibataire.
Mais Jean Dagobert n'avait, nous l'avons dit, que vingt ans, et il avait bien le temps de se marier, pour continuer sa singulière dynastie.
Donc, la nuit était froide, les moines chantaient Matines, et la lueur flamboyante de la forge se projetait sur les grands arbres de la forêt qui entourait le couvent de toutes parts.
Dagobert forgeait, forgeait, que c'était merveille ! et son marteau retentissait sur l'enclume avec un joyeux bruit, arrachant au fer qu'il battait des gerbes d'étincelles.
Cependant, un autre bruit domina tout à coup celui du marteau...