De tous les romans de Tourgueniev, le plus riche, le plus intense est sans doute Dimitri Roudine.
Le personnage de Roudine, largement autobiographique, nous y apparaît à travers un cercle d'hommes et de femmes qui le reflètent et nous l'expliquent successivement - procédé cher à Tourgueniev et qui devait influencer Guy de Maupassant. " L'âme d'autrui " a écrit quelque part Tourgueniev, " c'est la forêt obscure ". Et de fait, Roudine nous échappe, sympathique au début, puis antipathique, puis pitoyable.
Qui est-il réellement ? Est-ce un menteur ? Un imposteur ? Aime-t-il, comme il le dit, Natalie qui va épouser l'un de ses amis ? Sait-il la passion qu'il inspire à Doria ? Il est capable de bonté, de dévouement - de beaucoup de bassesses aussi. Il nous ressemble au fond, cet étranger, ni bon ni mauvais, délicat, indécis, complexe. A travers sa vie, c'est la vie réelle qui se découvre à nous, pauvre, triste, profonde.