Cloué sur son lit d’hôpital, Yvan raconte le fatal concours de circonstances qui l’y a conduit. Étudiant à Grenoble au début des années soixante dans un lycée huppé, puis en Fac de droit, au contact de jeunes issus de milieux aisés, il compense ses origines modestes et sa petite taille par sa grande gueule. Il aspire moins à faire partie de cette société qu’il méprise qu’à bénéficier des avantages matériels et moraux qu’elle peut lui dispenser. Instruit par l’exemple de son meilleur ami, débutant au cinéma, avec qui il partage brièvement les fastes et les travers de la vie parisienne branchée, il s’est en effet persuadé que l’argent est le chemin obligé du bonheur. Il croit l’atteindre grâce à un riche mariage, mais l’argent leur est compté par une belle-famille occupée aux antipodes à en gagner plus encore. En avoir beaucoup, très vite, devient alors son obsession, qu’il canalisera dans l’élaboration avec ses quatre compères d’une martingale à la roulette capable de dompter les hasards du tapis vert et de contenir les sautes d’humeur de la bille d’ivoire. La suite, tant aux plans financier que sentimental et amical, sera bien loin de ses espoirs initiaux, et finira par tourner au drame : un grave accident de voiture.
Le récit dépeint l'ambition sociale de notre révolutionnaire pré-soixante-huitard, englué dans une société figée, et jette un regard aigu sur les poncifs qui, pour lui, la guident. Il est aussi l’occasion d’une réflexion originale sur les jeux d'argent, et sur les motivations et ressorts psychologiques de ceux qui s'y adonnent. Avec, en toile de fond, l’amitié singulière du héros pour Sacha, l’inspirateur et le moteur de l’équipe des "martingaleux".